La chambre commerciale de la Cour de cassation a rendu un arrêt le 19 janvier 2022 rappelant que le contrat conclu par une société avant son immatriculation est frappé de nullité absolue et que cette nullité ne peut ainsi pas être rectifiée par un avenant signé postérieurement à l’immatriculation.
En l’espèce, un organisme prêteur a financé la reprise d’un fonds de commerce en consentant un prêt à une EURL « en cours d’immatriculation au Registre du commerce et des sociétés », représentée par des époux qui se sont portés caution solidaire du remboursement du prêt.
Quelques mois plus tard, la banque a consenti – dans les mêmes conditions – un prêt complémentaire à la société. L’année suivante, ladite société a consenti à la banque un nantissement sur son fonds de commerce.
Suivant la mise en liquidation judiciaire de l’EURL et l’ouverture d’un redressement judiciaire à l’encontre de l’épouse, la banque assigne l’époux en paiement des sommes restant dues au titre de ces deux prêts.
Alors que le juge de première instance a débouté la banque en raison de l’irrégularité de fond affectant le prêt, la Cour d’appel infirme le jugement en exposant que les époux avaient « à l’évidence agi au nom et pour le compte de la société en formation ».
La chambre commerciale rappelle, au visa de l’article 1842(1) du Code civil que les sociétés autres que les sociétés en participation (SEP) ne jouissent de la personnalité morale qu’à compter de leur immatriculation et casse l’arrêt d’appel. Il en résulte que les deux prêts sont nuls pour avoir été conclus par une société dépourvue de personnalité juridique.
La solution est classique, le défaut d’existence juridique emportant logiquement une incapacité à contracter, et s’inscrit dans une jurisprudence constante (Cass. Com., 21 février 2012, n°10-27.630).
Cette conclusion dépourvue d’ambiguïté s’applique quelle que soit la forme sociale de la société. Elle rappelle l’impérieuse nécessité de réaliser une due diligence sur ses partenaires ou cocontractants afin de limiter les risques stratégiques, humains ou… juridiques !